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La vie dépend des signaux que les molécules échangent. Par exemple, quand on se met en colère, l’adrénaline « dit » à son récepteur, et à lui seul, de faire battre le cœur plus vite, de contracter les vaisseaux cutanés… Les mots « signal moléculaire » sont très fréquemment utilisés en biologie. Mais lorsque l’on demande aux biologistes les plus éminents quelle est la nature physique de ce « signal », ils restent les yeux ronds, ne comprenant même pas la question. C’est qu’ils se sont mitonné une physique à eux, aux antipodes de la physique moderne, selon laquelle le simple contact entre deux molécules crée de l’énergie et permet un échange d’informations. Je l’ai longtemps cru, récité, sans me rendre compte de l’absurdité de la chose, comme pendant des centaines de milliers d’années les hommes ont cru que le Soleil tournait autour de la Terre.

La vérité, celle des faits, est très simple. Elle ne nécessite aucun « effondrement des mondes physique ou chimique ». Les molécules vibrent, on le sait depuis des décennies. Chaque atome de chaque molécule et chacune des liaisons chimiques, les « ponts » qui relient les atomes, émettent un ensemble de fréquences qui leur est propre. Ces fréquences spécifiques de molécules simples ou complexes sont détectées à des milliards d’années-lumières grâce à des radiotélescopes. Les biophysiciens les décrivent comme une caractéristique physique essentielle de la matière, mais les biologistes n’envisagent pas que des rayonnements EM (électromagnétiques) puissent jouer un rôle dans les fonctions moléculaires elles-mêmes. On ne trouvera les mots « fréquence » ou « signal » (au sens physique du terme) dans aucun traité de biologie, et encore moins « EM », cause, d’excommunication par le Saint-Office Scientifique du biologiste qui en ferait usage.

J’aimerais bien, tel Archimède, avoir eu dans mon bain l’idée géniale : « Eurêka, les vibrations des molécules ne leur servent pas à danser la salsa au bal du samedi soir ! Elles sont leur outil de travail, permettant d’adresser leurs instructions à la molécule suivante dans la cascade d’événements qui président aux fonctions biologiques… » Ce ne fut pas le cas. J’ai suivi une démarche purement expérimentale. Après huit années de recherches mes expériences montraient, vers 1991, qu’on pouvait transférer le signal moléculaire par un amplificateur et des bobines EM. En juillet 1995, j’ai enregistré et rejoué ce signal avec un ordinateur multimédia. Dans plusieurs milliers d’expériences, nous avons fait « croire » à un récepteur – spécifique d’une molécule simple ou complexe – qu’il était en présence de sa molécule préférée en lui « jouant » les fréquences enregistrées de cette molécule. Afin de parvenir à ce résultat, deux opérations sont nécessaires :

  1. enregistrer l’activité d’une substance sur un ordinateur
  2. la « rejouer » à un système biologique sensible à la substance d’origine.

Il y a tout lieu de penser que lorsque c’est la molécule elle-même qui est en présence du récepteur, elle fait la même chose : elle envoie les fréquences que le récepteur est capable de reconnaître. Ce qui veut dire que le signal moléculaire peut être efficacement représenté par un spectre de fréquences entre 20 Hz et 20.000 Hz. La même gamme que pour l’oreille humaine ou la musique. Depuis quelques centaines de milliers d’années les hommes font interagir des fréquences sonores avec un mécanisme biologique, celui de l’humeur. Les musiciens d’ambiance — musique d’ascenseur ou de supermarché — font de la neuro-psychobiologie sans le savoir. Les sons aigus et rapides engendrent la gaîté, les aigus et lents la douceur, les sons graves et rapides réveillent l’ardeur guerrière, les sons graves et lents le sérieux, la tristesse et le deuil. Ces sensations sont l’expression de phénomènes physico-chimiques cérébraux déclenchés par des fréquences définies. Nous ne faisons pas autre chose lorsque nous transmettons à des modèles biologiques des activités moléculaires enregistrées.

On peut donc faire l’hypothèse que les systèmes biologiques fonctionnent comme un poste de radio, par co-résonance. Si on le règle sur 92.6 mégahertz, on capte radio-Truc, parce que le poste et la station vibrent à la même fréquence. Si on change un peu le réglage, à 92.7, on ne capte plus radio-Truc mais radio-Machin.

Ces avancées dans la compréhension du mécanisme intime de la reconnaissance et de la signalisation moléculaire ne bouleversent pas la biologie, et encore moins la physique et la chimie. Nous ne retirons rien aux descriptions classiques. Nous faisons un pas de plus dans la connaissance, que nous ajoutons au corpus actuel. C’est la méthode normale du progrès scientifique et il n’y a aucune raison qu’elle soulève imprécations et anathèmes.

La nature électromagnétique du signal moléculaire éclaire bien des zones d’ombre en biologie. On comprend dès lors comment les millions de molécules biologiques peuvent ainsi ne communiquer (à la vitesse de la lumière) chacune, qu’avec leur molécule correspondante et elle-seule, condition indispensable du fonctionnement des systèmes biologiques… et pourquoi, une modification chimique infime entraîne des conséquences fonctionnelles considérables, chose que les biologistes « structurels » sont incapables d’expliquer. En décidant que ce sont les structures seules qui agissent, ils sont dans un monde pré-newtonien où, selon Ptolémée, les astres étaient reliés par des engrenages. D’où l’impuissance de la biologie actuelle à répondre aux grandes pathologies de cette fin de siècle. Pour passer de cette biologie figée des structures à celle de l’information circulant à la vitesse de la lumière, point n’est besoin de révolution. Enregistrer l’activité des molécules n’implique nullement de nier leur existence, comme cela a été fort stupidement répandu. Comme si enregistrer la voix d’un chanteur le faisait disparaître ! En d’autres termes, nous n’éliminons ni l’interrupteur ni la lampe. Nous disons qu’entre les deux il y a un fil et des électrons qui y courent. Nous captons, dupliquons, transférons — et bientôt modifierons — les signaux EM émis par les molécules exerçant normalement leurs fonctions.

Et l’eau dans tout ça ? C’est le transporteur d’information. C’est obligatoire, car, comme il y a 10 000 molécules d’eau pour une molécule de protéine dans l’organisme, tout message doit pouvoir passer par l’eau. C’est par des ondes hertziennes de basses fréquences que les sous-marins en plongée communiquent avec la terre, pas par des mégahertz qui ne passent pas dans l’eau. Autrement dit, lorsque des molécules déclenchent un effet biologique, ce ne sont pas elles qui transmettent le signal mais l’eau péri-moléculaire, qui sert de relais et probablement d’amplificateur. Le son n’est pas créé directement par le disque compact. Ce dernier porte une information qui n’est audible qu’après amplification par le système électronique.

Mais la mémoire de l’eau ? C’est plus mystérieux, mais pas plus que l’existence même de l’eau, un mélange, liquide à température et pression ordinaires, de deux gaz ( ? ! ? ! ?), qui se dilate en refroidissant ( ? ! ? ! ?). Des domaines cohérents avec des propriétés « laser-like » ont été décrits dans l’eau (E. del Giudice, G. Preparata, G. Vitiello (1988) Water as a free electric dipole laser Phys. Rev. Lett. 61:1085-1088). Plus récemment, des cristaux « de glace » stables qui comportent un champ électrique ont été identifiés et caractérisés dans l’eau. Il reste du travail aux physiciens. Cependant l’eau n’est pas notre sujet d’étude. Ce qui intéresse notre équipe, ce n’est pas le support magnétique et comment il fonctionne, mais le message qui y est enregistré et peut donc être copié et transmis. Nous avons élucidé, nous pouvons le croire avec beaucoup de confiance au vu de nos résultats expérimentaux, la nature physique du signal moléculaire. Le principe est simple, comme de faire exploser un mélange d’air et de pétrole. Mais les conséquences sont immenses. Nous les présentons en détail par ailleurs.

En voici un résumé

Actuellement la seule façon d’identifier une molécule est de transmettre physiquement un prélèvement, le plus souvent invasif, voire destructif, jusqu’à un laboratoire d’analyses. Avec la méthode numérique, on dispose à la source d’un signal qui peut être instantanément transmis et analysé à l’autre bout du monde par des moyens de télécommunication classiques. La détection de substances toxiques, de protéines (antigènes, anticorps, prions) ou de complexes moléculaires (bactéries, virus, cellules anormales…) devient donc possible sans prélèvement physique. Ces méthodes seront applicables à l’industrie chimique, à la bio-médecine et à la surveillance de l’environnement. On pourra par exemple détecter des micro-organismes à distance, pratiquement en temps réel. Les produits issus de plantes transgéniques pourront être identifiées par liaison téléphonique chez le producteur, le distributeur et même dans l’assiette du consommateur. La détection d’une contamination alimentaire par les prions, mais également in vivo chez l’animal ou chez l’homme, deviendrait possible avec les conséquences épidémiologiques et économiques que l’on devine.

La mise en oeuvre des méthodes issues de la biologie numérique aura un immense retentissement sur le diagnostic médical et l’industrie agro-alimentaire, avec un impact technologique et commercial considérable.

Jacques Benveniste 1998
www.digibio.com