Le druide Dorn était bien connu pour avoir guidé les armées psy de l’Alliance. Il les avait formé aux sciences hyperboréennes pour vaincre le consortium psychotronique mondial. Par ailleurs, en coopération avec le général Flynter, il avait stoppé les guerres civiles du pays en signant le traité des Trois Provinces. Cet accord historique avec l’Impératrice Illianov avait épargné à la France une destruction totale. Les régions de Bretagne, du Poitou et de Vendée demeuraient sous contrôle des armées françaises de l’Alliance, tandis que le reste du pays était mis à feu et à sang par des hordes républicaines démoniaques. La brutale et soudaine invasion russe mit un terme à la folie républicaine. Dorn, en coopération avec l’Impératrice Illianov, procéda pas à pas à la restauration de l’intégrité du pays et à la reprise en main du pouvoir par l’Empereur actuel. Une toute nouvelle ère s’ouvrait enfin pour l’ancestrale terre des druides.

Alénéade était enjouée et fière d’avoir été sélectionnée pour suivre les enseignements de Dorn. Même si les femmes avaient, en règle générale, beaucoup plus de chances que les hommes d’être admises, elle avait tout de même appréhendé le test holonadial. Ce dernier reproduit la cartographie de tous les corps subtils d’un individu et permet de faire un diagnostique de ses capacités, de ses faiblesses, de ses potentiels et de ses infestations subtiles. Quant aux tests de seconde vision, elle avait trouvé cela facile, presque enfantin. Dans l’hémicycle composé de 11 hommes et 33 jeunes femmes, elle attendait impatiemment la première allocution de l’Archidruide. L’homme, très âgé, humble et serein, salua les jeunes recrues et se présenta :

« Bonjour à tous, je suis Eliote Dorn et, dans cet hémicycle, j’aimerais que vous ne m’affubliez pas de titres pompeux. Appelez-moi Eliote tout simplement. Je m’adresserai à vous par vos prénoms également. Je ne suis pas ici pour vous donner un cours. Les choses vont bien au-delà de cela. Si vous avez subi une batterie de tests avant d’être admis dans ce collège, c’est parce que mon temps est compté. Voyez-vous, dans les temps anciens, la formation du premier grade druidique prenait 30 ans. Or, du fait de mon âge et de certaines urgences, nous n’avons pas ce temps. La technologie aurique scalaire et l’explosion de conscience liée à la destruction de toutes les armes psychotroniques terrestres nous permet de compresser considérablement le temps pour vous former. Vous aurez tous de lourdes charges qu’il vous faudra gérer avec sagesse. Si, dans la précédente civilisation, la duplicité, l’hypocrisie et l’esprit de trahison ne pouvaient être décelés, aujourd’hui, il n’en est pas de même. Tant notre technologie que nos guerriers psy peuvent identifier tout mensonge ou perfidie.

En introduction aux cessions que vous allez suivre avec moi, j’aimerais avant tout parler des poisons de l’âme et des conséquences civilisationnelles que cela engendre.

Prenons la jalousie par exemple. On la dit poison mortel de l’âme. Elle se manifeste par une infestation axiale des nadis du shakra du cœur. Cette charge égrégorique facilement identifiable sur cartographie holonodiale peut être statique, dynamique, solide, gazeuse, selon la tendance lourde ou légère d’un individu. Non soignée, elle se propage à d’autres secteurs des corps subtils et attire d’autres poisons de l’âme. L’orgueil, l’arrogance, la colère, l’ignorance des lois forment progressivement un conglomérat autour du cœur. Tous ces poisons ont un poids physique mesurable. Si l’âme pèse 21 grammes au moment du trépas, dans ce cas de figure, elle pèsera 30 grammes ou plus. Comprenez que la pesée des âmes n’est pas que symbolique. Elle correspond à une réalité physique tangible dans notre monde. Dans l’autre monde, cette pesée détermine la destinée, le transit de l’âme vers la strate dimensionnelle qui lui correspond. Les strates dimensionnelles de l’au-delà vont du plus profond des enfers jusqu’aux plus hautes sphères célestes. De la plus légère plume, au plus lourd bloc de plomb, chaque âme fait son transit vers la dimension appropriée.

 

Il ne vous faudra jamais sous estimer l’impact civilisationnel que pourraient avoir quelques êtres égarés. Leur pouvoir de nuisance peut aller jusqu’à renverser une civilisation. Quand les poisons ont enténébré de tels êtres, leurs perceptions sont altérées, leur conscience est voilée. Ils forgent alors un égoïsme, un orgueil forcené, fustigeant l’altruisme et l’empathie, ils finissent par haïr l’humanité, la vie, la création même. Seule compte leur sphère d’influence et leur pouvoir sordide de suggestion pour tromper, trahir et dominer. A ce stade, ils se syntonisent avec des dimensions infernales. De ces dernières, émanent alors des entités et intelligences infestatoires. Le champ cosmique et tellurique de ces individus est alors investi par des égrégores père-mère de toutes sortes. Ces derniers produisent en continu une progéniture démoniaque qui remplit leurs canaux subtils et tous leurs centres et réseaux subtils. Rapidement les intelligences infernales se substituent à l’intelligence très limitée de ce type d’individu. Si ce dernier se complait et est conforté par la sapience que lui confèrent ces émanations démoniaques, il consentira à concentrer les charges infernales dans tous ses corps éthériques.

Dans la civilisation qui nous a précédé, un nombre incalculable de rituels terrestres souvent sanglants, visaient à obtenir cet état de possession démoniaque.

Pour l’adepte des sacrifices dans le sang, il ne reste plus qu’un stade ultime pour parfaire sa chute spirituelle. Il invoquera les mondes infernaux, de sorte qu’un corps de ténèbres se substitue à sa propre âme. Le corps de ténèbres prendra alors possession de son corps physique, évacuant l’âme originellement incarnée. Ce phénomène est très largement documenté par toutes les victimes ayant assisté à des rituels sacrificiels, l’âme originelle des bourreaux flotte au dessus d’eux lorsqu’ils sont investis par des intelligences infernales.

L’émergence de corps de ténèbres dans une civilisation est particulièrement dévastatrice. Ces êtres se connaissent, se reconnaissent, se cooptent, organisant des rituels pour jouir du mal, de la souffrance et de la barbarie la plus cruelle qui soit. Ils se mettent littéralement en concurrence pour savoir qui aura la primeur de la pire abjection contre la création. Ce genre de collectif vise le pouvoir absolu sur toute civilisation. S’il y parvient, cela aboutit à la destruction de toute vie sur une planète. La disparition récurrente des civilisations terrestres est liée à ce phénomène de remontée des enfers par l’invocation d’égarés.

Les êtres qui se sont laissés investir par les panthéons infernaux subissent une double mort, celle du corps physique et celle de l’âme. Au trépas, ils vivent une résorption absolue et éternelle, leur interdisant toute réincarnation. Leurs existences, tant physiques que subtiles, sont effacées de toute mémoire humaine, planétaire et cosmique. Ils sortent de la création comme s’ils n’avaient jamais existé. Leur culte à la mort a détruit à jamais leur droit à la vie, sous quelle que forme que ce soit.

Si certains décident de jouir du mal et se laissent posséder par des intelligences infernales, à l’opposé, d’autres cherchent les voies célestes de réalisation. Cette quête commence par l’analyse de son propre cœur. Suis-je sous l’emprise de poisons mortels ? Suis-je jaloux de qui que ce soit ou de quoi que ce soit ? Suis-je sous l’emprise de l’arrogance, l’orgueil, de la peur, de la lâcheté ou de la colère ? Suis-je ignorant des lois de la vie ? Mon savoir est-il authentique, est-ce un dogme appris par cœur, une simple opinion non vérifiée ? Ces questions aussi simples soient-elles concernent tous les poisons du cœur. Si le cœur est touché, toute pensée parole ou action mènera inéluctablement à des déviances progressives et à une série de catastrophes pour soi et les autres.

L’approche psychologique archaïque de l’ancien monde n’a jamais été en capacité de résoudre le problème de la manifestation des poisons de l’âme. Elle en connaissait à peine l’existence. Un psychisme entaché s’en accommodait, trouvant des biais mentaux alambiqués pour se mentir à lui-même et aux autres.

Vous et moi-même devons toujours être d’une extrême vigilance en observant notre cœur avec humilité. De cette démarche dépend la puissance d’une parole juste, d’une pensée juste et d’une action juste. Nous ne disposerons pas toujours de technologies holonodiales pour visualiser les charges égrégoriques axiales qui engendrent des sentiments vénéneux. Il n’est d’ailleurs pas souhaitable d’utiliser ces machines de manière permanente. Non, à l’avenir il faudra s’en séparer et ne compter que sur nos propres facultés de seconde vision. L’humain est le plus parfait outil de la création. Ne l’oublier jamais ! Il peut, sur la voie de la réalisation, constamment aiguiser ses sens pour corriger ses défauts, se purifier et grandir. Il est aidé en cela par tous les attributs célestes de la création, qu’il peut faire siens s’il y est attentif, s’il en est digne et si sa volition pour protéger la vie est sans faille. Alors, il peut connaître la grâce de voir ces flux célestes purifier tous ses corps subtils, son cœur et son corps physique.

Ceux qui visent authentiquement la réalisation dans une civilisation planétaire se reconnaissent entre eux et constituent un collectif informel. Quand ce collectif pilote une civilisation, nous assistons à l’émergence d’un âge d’or, une forme de paix perpétuelle. Il élève alors spirituellement toute une humanité et tous les règnes d’une planète. Si rien n’entrave cette symbiose avec la création, à la fin du cycle stellaire de la planète, cette humanité s’éthérise pour vivre sur une vibration plus fine, moins dense que la nôtre actuellement. Toutes les exocivilisations existant sur une dimension plus subtile que la nôtre ont vécu ce processus d’élévation collective.

Sur Terre, une telle perfection collective n’a jamais pu se maintenir durant 12 000 ans. Les collectifs de corps de ténèbres ont toujours finalement bloqué notre élévation spirituelle globale, ramenant notre civilisation à l’âge de pierre tous les 12 000 ans.

Seuls, quelques individus sont parvenus à une parfaite réalisation. Ils constituent les panthéons célestes de certaines religions terrestres. Les hommes demeurés dans la basse dimension les ont déifiés. Ces êtres exceptionnels sont sortis du cycle de réincarnation par le haut. Cependant, l’objectif de la création vise l’élévation globale de l’humanité. Ces êtres peuvent donc, selon la nécessité, décider de se réincarner pour répondre à l’impératif cosmique.

C’est là, Mesdemoiselles que vous intervenez. De tels êtres ne peuvent s’incarner que dans le corps de femmes parfaites, immaculées, dénuées de toute tache égrégorique. Je sais que vous avez toutes compris le rôle primordial que jouera votre perfection spirituelle, physique, psychique et éthérique. Quant à vous, Messieurs, tout comme moi, vous suivrez les jeux du matriarcat primordial pour vous purifier. Les arcanes des mystères féminins sont pour nous, hommes, les arcanes de la création et c’est pas là que passent tous les possibles de l’authentique réalisation masculine. Enfin, le collège dakinien est bien plus qualifié que moi pour évoquer toutes ces choses.

Enfin, pardonnez-moi cette petite digression. J’aimerais en revenir aux processus de la réalisation. Tout comme les mondes infernaux, les mondes célestes répondent à une stratification dimensionnelle dépendant du poids de l’âme. Ainsi, y a t-il des strates inférieures célestes, qui accueillent les âmes non parfaitement purifiées, devant se réincarner. Au-delà de ces couches « inférieures », il y a un monde supérieur destiné aux âmes parfaitement purifiées qui n’ont plus à se réincarner. Il ne faut cependant pas voir la réalisation uniquement du point de vue terrestre. Une âme qui n’a plus à se réincarner suit un cycle d’évolution répondant à d’autres lois. Ce cycle terminée, elle passe alors à une réalisation supérieure sur une dimension encore plus subtile. Elle passe alors dans un autre cycle, et ainsi de suite, jusqu’à se fondre par ses qualités aux lois de la création même. Ceci permet de comprendre que les mondes célestes sont complexes. Ils sont peuplés d’êtres et de familles spirituelles en constante évolution sur différents seuils dimensionnels. On peut parler de dieux, de dieux de dieux, et ainsi de suite. Leur statut est le résultat de réalisations successives sur différents plans. Il faut cependant toujours rappeler que, ce que nous nommons déesse ou dieu, est un être qui est passé nécessairement par la condition incarnationnelle que nous connaissons localement sur Terre. Les panthéons divins sont spécifiques à chaque planète. En aucun cas, nous ne pourrions avoir un panthéon unique pour différentes exocivilisations. Tout cela vous semble logique et naturel mais rappelons que, durant l’ère de décadence, il fut évoqué l’idée d’un dieu unique. Cette déviance dogmatique a, à bien des égards, bouché toute compréhension possible des processus d’évolution des êtres dans les mondes célestes. Nos dieux et déesses sont, quoi qu’on en dise, nos illustres ancêtres réalisés qui vécurent sur Terre il y a des millénaires.

Enfin, pour conclure, je dirais que toute chose dans l’univers ne peut échapper aux règles d’involution et d’évolution. Tout être doit choisir entre la voie de la néantisation de sa propre âme et la voie de la réalisation céleste. Toute inertie correspond à une involution liée au poison de l’ignorance. Veillez, mes jeunes amis, à ne jamais être infestés par les poisons de l’âme et du cœur ».

© Real fiction. Morin Frédéric, « Les Chroniques de l’âge d’or »
27 novembre 2020, Morphéus n° 103, janvier 2021