La légende d’Apollon doit être revisitée à partir des préceptes du féminin sacré contenus dans les jeux phonémiques des langues anciennes. L’exercice est difficile mais essentiel. Les sciences féminines protohistoriques hyperboréennes sont les clés pour éclairer d’un regard nouveau le culte d’Apollon. Nombre de textes qui nous sont parvenus ont subi des altérations considérables, tronquant littéralement le sens de la légende des origines. La révolution patriarcale a doctement effacé l’importance primordiale des triades féminines, interdisant par là, l’accès à la compréhension d’un mythe fondateur civilisationnel. Se sont ajoutés à cela des idéologies politico-mythiques qui ont ombragé, déformé, voire inversé le sens initiatique apollonien. Il en résulte une grave ignorance et de terribles incompréhensions toujours actuelles. Exhumer le culte originel est une gageure mais cet effort est vital pour ouvrir la voie au retour de l’Hyperborée dans nos vies. En cette période de fin de civilisation sans repère, qui ne cesse de s’effondrer sur elle-même, il est heureux et salutaire de comprendre un peu ce que fut l’âge d’or. Ce n’est pas un simple mythe mais une réalité protohistorique, qui forgea les fondations de toutes les traditions, toutes les spiritualités, toutes les religions, toutes les sciences, toutes les langues et bien au-delà. Tous les efforts de la civilisation hyperboréenne convergeaient vers un seul but : travailler à l’affinage biologico-spirituel de l’humain, en vue d’éveiller tous les êtres sur Terre.

Perfection surnaturelle des peuples d’Hyperborée, pays de Leto, mère d’Apollon

« Ces peuples merveilleux ne sont point étrangers aux muses. On voit parmi eux les vierges se réunir en chœurs : partout retentissent les mélodieux accents de la lyre, mariés au son des flûtes et des hautbois. Une gaîté franche règne dans leurs festins, où le laurier doré pare le front des convives animées par le plaisir. Jamais l’affligeante vieillesse, jamais les maladies n’atteignirent cette nation sainte ; elle ne connaît ni les travaux pénibles ni la guerre… » (Pindare , dixième Pythian Ode ; traduit par R. Lattimore).

Apollon et Daphné

Frère d’Artémis, Apollon était le fils de Zeus et de la nymphe Leto. Selon la légende transmise depuis la lointaine protohistoire par la mythologie grecque, la nymphe Daphné fuyait Apollon qui voulait s’unir à elle. Alors qu’il allait la saisir, pour échapper à son empressement et conserver sa virginité, elle pria son père qui la métamorphosa en laurier rose. Pour ne pas être séparé de sa bien-aimée, Apollon fabriqua une couronne en forme de croissant de lune avec deux rameaux fleuris de laurier rose. Il la posa sur sa tête. Daphné, transformée en arbre, manifesta son approbation par un tremblement.

Se transformer en arbre est un acte fondateur ouvrant sur une lignée, un arbre généalogique. C’est en même temps l’arbre des prophéties pour l’avenir de la descendance, incarné par une mère première. Cette lignée doit être vierge de tout poison de l’âme, il s’agit donc de pérenniser une virginité spirituelle, une perfection, de génération en génération. Daphné demande à son père de la métamorphoser, comme une jeune femme demanderait à son père l’autorisation de s’unir à un homme. Quant à Apollon, il couronne sa tête de laurier rose, acte symbolique d’union. Daphné acquiesce par un tremblement d’extase. Le laurier est ainsi le symbole d’excellence de l’union et caractérise aussi l’absolu respect de la tradition matriarcale primordiale des origines. Le culte du laurier s’est perpétué sous différentes formes jusqu’à nos jours. Utilisé lors des jeux pythiques de Delphes, les couronnes de laurier étaient distribuées comme prix. Il sera utilisé par les généraux Romains comme symbole de victoire et, plus proche de nous, utilisé dans les Premier et Second Empire napoléoniens. On utilise aujourd’hui le terme « lauréat » qui fait toujours écho à l’ancestral culte d’Apollon.

© F. Morin & R. Skotarek
Morphéus n°105, mai juin 2021