Nous évoquons depuis des années le problème insoluble que représente le système usuraire à l’échelle planétaire. S’il fallait arrêter les comptes aujourd’hui et réellement payer les dettes, ni les banques, ni les entreprises, ni les états, ni les continents, ni la planète même ne le pourrait. Nous serions tous à la rue, devant des magasins remplis de nourriture gâtée, face à une industrie vidée de ses ouvriers, des services publics inopérants, etc.

En somme, l’humanité se trouverait dans son ensemble exclue de toute structure socio-économique, dissoute par la folie de la création monétaire ex-nihilo des banques d’affaires et autres sbires de la finance.

Le temps est donc venu de repenser ce qu’est l’argent. Il doit être au service de l’homme et non l’inverse. L’argent ne peut être conçu que comme un outil social de civilisation s’accordant à la réalité économique des biens et de services planétaires, s’accordant aussi à la réalité humaine. Un homme au cours de sa vie contribue un temps à la richesse de la collectivité et à d’autres périodes (enfance, retraite, maladie), il doit pouvoir sans travail prendre sur la collectivité les biens nécessaires à sa survie.

La première marche sur le chemin d’une authentique civilisation planétaire consiste à ce que chaque être humain travaillant ou non soit assuré de vivre dignement et non de survivre ou mourir de faim.

Nous sommes à une période critique et nous avons évoqué certains outils transitoires pour maintenir quelques secteurs d’économie solidaire. Les systèmes d’échanges locaux, la mise en place informelle d’une réserve bancaire citoyenne européenne fondée sur l’or et l’argent, le prêt possible de particulier à particulier, le prêt sans intérêts à des acteurs économiques. Cette dernière option est utilisée dans les pays musulmans et elle est parfaitement fonctionnelle sous différentes formes.

Cependant, ces moyens sont insuffisants. A un système usuraire de spoliation mondiale, il faut une réponse technique mondiale civilisatrice et anti-spoliatrice. Il va nous falloir mettre Marx, Keynes et Adam Smith aux ordures afin de mettre en œuvre une économie planétaire de civilisation !

Histoire du Crédit Social

La réponse au système usuraire global a été mise en œuvre en 1919 par Clifford Hugh Douglas. De 1919 à 1924, la réforme du Crédit Social a suscité de grands débats, commentaires favorables de la presse, en Grande Bretagne et à l’étranger. Pour endiguer la progression fulgurante des débats sur le Crédit Social, l’Institut des Banquiers de Grande Bretagne, piloté par la Rothschild, alloua l’équivalent de 24 millions de dollars pour combattre ces idées. Les grandes associations de presse, les journaux métropolitains, tant en Grande Bretagne qu’aux USA ont reçu des directives leur enjoignant de ne jamais mentionner les idées « subversives » du Crédit Social. La censure sur le sujet a perduré jusqu’à aujourd’hui.

Pourtant, même le premier gouverneur de la Banque du Canada, Graham Towers, admettait en 1939 devant un comité de la Chambre des Communes que le Crédit Social était parfaitement faisable, lorsqu’on lui demanda pourquoi un gouvernement devrait payer des intérêts pour de l’argent qu’il peut créer lui-même sans intérêt.

Le Prix Nobel d’économie, Maurice Allais, a soutenu toute sa vie l’idéologie économique du Crédit Social. Il fut ostracisé par la haute finance, interdit de médias, non parce qu’il la critiquait mais parce qu’il savait techniquement comment remplacer le système usuraire actuel de « ces faux monnayeurs ».

Mieux comprendre le Crédit Social

Les banquiers internationaux craignent tellement l’application du Crédit Social, qui mettrait justement fin à leur contrôle de la vie économique, qu’ils ont tout essayé pour stopper sa progression dans les esprits. Alors, une des tactiques favorites des Financiers sera de falsifier ces principes et de les présenter d’une façon absurde et ridicule dans les médias, pour empêcher que davantage de gens y adhèrent.

Quand on leur parle de Crédit Social, la plupart des économistes ne font que répéter les mensonges des financiers : « Votre affaire, le Crédit Social, ça ne tient pas debout ! Voyons donc, imprimer de l’argent comme ça, sans arrêt, ça va faire de l’inflation ! » Et en disant cela, ils pensent avoir tout dit du Crédit Social, alors qu’ils ignorent tout du sujet, ne connaissant absolument rien de la circulation de l’argent sous un système créditiste, rien de l’escompte compensé ou du dividende, ou ne voulant pas le connaître sans doute ! Ce dont ils ont entendu parler, c’est d’un faux Crédit Social, d’une version falsifiée par les Financiers. Voici donc un résumé du vrai Crédit Social, basé sur les deux brochures de Louis Even, « Qu’est-ce que le vrai Crédit Social ? », et « Une finance saine et efficace ».

La comptabilité exacte

Tout d’abord, définissons les mots « crédit social » : au lieu d’avoir un argent créé par les banques (crédit bancaire à intérêt), on aurait un argent créé sans dette par la société, un crédit social. Le système du Crédit Social ne vise à rien d’autre qu’à faire de l’argent un reflet exact des réalités économiques. Il n’est donc aucunement question dans le Crédit Social d’émettre ou d’imprimer de l’argent n’importe comment, de façon irresponsable ou sans limites (comme se plaisent à le faire croire certains), ou selon les caprices des politiciens au pouvoir. La vraie méthode proposée, la voici :

Le Gouvernement nommerait une commission de comptables, un organisme indépendant appelé par exemple « Office National de Crédit », qui serait chargé d’établir une comptabilité exacte : l’argent serait émis au rythme de la production, et retiré de la circulation au rythme de la consommation. On aurait ainsi un équilibre constant entre la capacité de produire et la capacité de payer, entre les prix et le pouvoir d’achat.

Ce que les Créditistes demandent, c’est que le Gouvernement cesse d’emprunter à des banques privées de l’argent qu’il peut créer lui-même sans intérêt, par sa banque centrale.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la Banque du Canada a créé jusqu’à 50 % de l’argent du pays, sans inflation. Aujourd’hui, elle en crée moins de 2 %. Le reste, 98 %, est créé par les banques sous forme de prêts. Bien des gens ignorent ce fait, et ne savent pas que les banques privées, contrairement aux autres prêteurs, créent l’argent qu’elles prêtent, et qu’elles ne prêtent pas (seulement) l’argent de leurs déposants.

Que l’argent soit créé par une Banque Centrale ou les banques privées, il faut bien qu’il soit créé quelque part. Il s’agit des mêmes chiffres, basés sur la même production du pays. La seule différence (et elle est de taille !), c’est que si le gouvernement emprunte de sa propre banque centrale, il n’encourt aucune dette.

100 unités créées sans intérêts par la Banque Centrale, ou 100 créées avec intérêts par une banque privée : lequel des deux va créer de l’inflation ? Même un enfant de dix ans trouverait tout de suite la réponse : c’est celui qui est créé avec intérêt par la banque privée. L’inflation, c’est la hausse des prix, causée par la hausse des coûts de production, et les intérêts à payer par les producteurs aux banques font partie de ces coûts. Une étude de l’économiste allemande, Margritt Kennedy, permet d’estimer que l’incidence des intérêts sur les prix hors taxe varie, suivant la nécessité du capital à la production, de 10 à 90 %, avec une moyenne d’environ 50 %.

Ce qui est tout à fait incroyable et contraire à la logique la plus élémentaire, c’est que les économistes disent que pour arrêter l’inflation (la hausse des prix), il faut augmenter les taux d’intérêt, alors qu’au contraire, toute hausse des taux d’intérêt fait nécessairement augmenter les prix et bloque donc la production en amont et ceci « leur » permet de garder un volant de chômeurs (conséquences : salaires plus bas, profits plus élevés). Le système « farfelu », ce sont eux qui le préconisent, pas les créditistes.

Mais le Crédit Social ne se limite pas seulement à une simple question de création d’argent. Il y aussi le dividende, et l’escompte compensé.

Le dividende

Parce que les salaires ne suffisent pas pour acheter toute la production existante (les salaires ne forment qu’une partie des coûts de production de n’importe quel article), l’Office National de Crédit distribuerait à chaque citoyen un dividende mensuel, une somme d’argent permettant d’augmenter le pouvoir d’achat, et d’assurer à chacun une part des biens du pays. Ce dividende serait basé sur les deux plus grands facteurs de la production moderne, l’héritage des richesses naturelles et des inventions des générations passées, tous deux dons gratuits, qui appartiennent donc à tous. Ceux qui seraient employés dans la production recevraient évidemment leur salaire, mais tous, salariés comme non-salariés, recevraient le dividende.

La formule du dividende serait infiniment profitable au bien-être social, à l’assurance-chômage et autres répartitions actuelles de sécurité sociale, car il ne serait pas pris dans les impôts de ceux qui travaillent, mais serait financé par de l’argent nouveau, créé par l’Office National de Crédit. Personne ne se ferait donc vivre par les impôts ou taxes des contribuables ; ce serait un héritage dû à tous les citoyens du pays, qui sont pour ainsi dire tous actionnaires de la compagnie « Canada Limitée ».

Et contrairement aux indemnités de chômage ou autre « revenu minimum d’insertion », ce dividende serait distribué sans condition ni enquête préalable, il ne pénaliserait donc pas ceux qui veulent travailler. Loin d’être une incitation à la paresse, il permettrait aux gens de s’occuper dans l’activité de leur choix, celle où ils ont des talents. D’ailleurs, si les gens arrêtaient de travailler, le dividende baisserait automatiquement, puisqu’il est basé sur la production existante.

Le financement des « biens publics »

Comment se ferait le financement des services et travaux publics avec un tel système d’argent social ? Chaque fois que la population désirerait un nouveau projet public, le gouvernement ne se demanderait pas : « A-t-on l’argent ? », mais : « A-t-on les matériaux, les travailleurs pour le réaliser ? » Si oui, l’Office National de Crédit créerait automatiquement l’argent nécessaire pour financer cette production nouvelle.

Supposons, par exemple, que la population désire un nouveau pont, dont la construction coûte 50 millions. L’Office National de Crédit crée donc 50 millions pour financer la construction de ce pont. Et, puisque tout argent nouveau doit être retiré de la circulation lors de la consommation, ainsi l’argent créé pour la construction du pont devra être retiré de la circulation lors de la consommation de ce pont.

De quelle manière un pont peut-il être « consommé » ? Par usure ou dépréciation. Supposons que les ingénieurs qui ont construit ce pont prévoient qu’il durera 50 ans ; ce pont perdra donc un cinquantième de sa valeur chaque année. Puisqu’il a coûté 50 millions à construire, il subira donc une dépréciation d’un million par année. C’est donc un million qui devront être retirés de la circulation chaque année, pendant 50 ans. Au bout de 50 ans, le pont sera complètement payé, sans un sou d’intérêt ni de dette.

Est-ce que ce retrait d’argent se fera par les impôts ? Non, cela n’est nullement nécessaire, dit Douglas, le concepteur du système du Crédit Social. Il existe une autre méthode bien plus simple pour retirer cet argent de la circulation, celle de l’ajustement des prix (appelé aussi escompte compensé).

D’ailleurs, sous un système de crédit social, les impôts diminueraient de façon drastique, et la plupart disparaîtraient tout simplement. Le juste principe à observer, c’est que les gens ne paient que pour ce qu’ils consomment. Par contre, il serait injuste de faire payer à la population de tout le pays des services qui ne sont offerts que dans une rue ou une municipalité ; ce sont ceux qui bénéficient de ces services qui auraient à payer la municipalité qui les fournit.

L’ajustement des prix

De quelle manière cet ajustement des prix fonctionnerait-il ? L’Office National de Crédit serait chargé de tenir une comptabilité exacte de l’actif et du passif de la nation, ce qui ne nécessiterait que deux colonnes : d’un côté, on inscrirait tout ce qui est produit dans le pays durant la période en question (l’actif), et de l’autre, tout ce qui est consommé (le passif). Le 1 million de dépréciation annuelle du pont, de l’exemple mentionné plus haut, serait donc inscrit dans la colonne « passif » ou « consommation », et ajouté à toutes les autres formes de consommation ou disparition de richesse durant l’année.

Douglas fait aussi remarquer que le vrai coût de la production, c’est la consommation. Dans l’exemple du pont, le prix comptable était de 50 millions. Mais le prix réel du pont, c’est tout ce qu’il a fallu consommer pour le produire. S’il est impossible de déterminer pour un seul produit quel a été son prix réel, on peut, par contre, facilement savoir quel a été, durant une année, le prix réel de toute la production du pays : c’est tout ce qui a été consommé dans le pays durant la même période.

Ainsi, si les comptes nationaux d’un pays montrent que, dans une année, la production privée (production de biens consommables), a été de 500 milliards , et que pendant la même année, la consommation totale a été de 400 milliards, cela veut dire que le pays a été capable de produire pour une valeur de 500 milliards de produits et services, tout en ne dépensant, ou consommant, que pour une valeur de 400 milliards. Autrement dit, cela démontre qu’il en a coûté réellement 400 milliards pour produire ce que la comptabilité des prix établit à 500 milliards.

Le vrai prix de la production est donc de 400 milliards. La population doit donc pouvoir obtenir le fruit de son travail, la production de 500 milliards, en payant seulement 400 milliards. Car il a été bien établi plus tôt que l’argent ne doit être retiré que selon la consommation : s’il s’est consommé pour 400 milliards de produits et services, on ne doit retirer de la circulation que 400 milliards, ni plus ni moins.

Escompte sur les prix

Comment faire pour que les consommateurs puissent obtenir pour 500 milliards de produits et services tout en ne payant que 400 milliards ? C’est très simple, il suffit de baisser le prix de vente de tous les produits et services de 1/5, soit un escompte de 20 % : l’Office National de Crédit décrète donc un escompte de 20 % sur tous les prix de vente pendant le terme suivant. Par exemple, le client n’aura qu’à payer 400 pour un article étiqueté 500 .

Mais, s’il ne veut pas faire faillite, le marchand doit quand même récupérer 500 pour la vente de cet article, et non pas seulement 400 , car ce prix de 500 inclut tous ses frais. C’est pourquoi on parle d’un escompte « compensé » : dans ce cas-ci, le marchand sera compensé par l’Office National de Crédit, qui lui enverra le 100 qui manquent.

Pour chacune de ses ventes, le marchand n’aura qu’à présenter ses bordereaux de vente à l’Office National de Crédit, qui lui remboursera l’escompte accordé au client. Ainsi, personne n’est pénalisé : les consommateurs obtiennent les produits qui, sans cela, resteraient invendus, et les marchands récupèrent tous leurs frais.

Inflation impossible

Grâce à ce mécanisme de l’escompte sur les prix, toute inflation serait impossible : en effet, l’escompte fait baisser les prix. Et l’inflation, ce sont les prix qui montent. La meilleure manière d’empêcher les prix de monter, c’est de les faire baisser ! De plus, l’escompte sur les prix est exactement le contraire de la taxe de vente : au lieu de payer les produits plus cher par des taxes, les consommateurs les paient moins cher grâce à cet escompte. Qui pourrait s’en plaindre ?

On voit bien alors que ceux qui disent que le Crédit Social va faire de l’inflation se trompent, car ils ignorent l’existence de l’escompte compensé. Bien sûr, s’il n’était question dans le Crédit Social que d’imprimer de l’argent et rien d’autre, les craintes de l’inflation seraient justifiées, mais justement, le Crédit Social possède une technique pour faire face à tout danger d’inflation.

Il existe donc trois principes de base dans le Crédit Social :

  1. l’argent est émis sans dette par le gouvernement, représentant de la société, selon la production, et il est retiré de la circulation selon la consommation ;
  2. le dividende mensuel est versé à tous les citoyens ;
  3. l’escompte compensé qui rééquilibre l’ensemble.

Les trois sont nécessaires ; c’est comme un trépied : enlevez un de ces trois principes, et le reste ne tient plus.

Toute cette technique du Crédit Social, telle qu’expliquée très brièvement ci-dessus, n’a qu’un but : financer la production des biens qui répondent aux besoins, et financer la distribution de ces biens pour qu’ils atteignent les besoins. En examinant la circulation du crédit sur le schéma ci-dessous, on s’apercevra que l’argent ne s’accumule en aucun temps, qu’il ne fait que suivre le mouvement de la richesse, entrant en circulation au rythme de la production, et prenant la voie du retour vers sa source (l’Office National de Crédit) au rythme de la consommation (lorsque les produits sont achetés chez le marchand). En tout temps, l’argent demeure un reflet exact de la réalité : de l’argent apparaît lorsqu’un nouveau produit apparaît, et cet argent disparaît lorsque le produit disparaît (est consommé). Où est l’inflation là-dedans ?

Tout cela ouvre des horizons et possibilités insoupçonnés. Pour que ces possibilités deviennent réalités, il faut que chacun ait connaissance de la proposition des Créditistes.

Extraits de l’article d’Alain Pilote, paru dans Vers Demain de mars-avril 1995. Voir également le livre Bankster, vol au dessus de tout soupçon, sur bankster.tv.

Le moment psychologique

Il viendra un moment psychologique, un moment critique où la population, étant donné la gravité de la situation en aura assez de souffrir du système de l’argent dette. Elle sera alors disposée à étudier, comprendre et accepter le Crédit Social.

« Une période relativement courte permettra probablement de décider si nous pouvons maîtriser la machine économique et sociale que nous avons créée, ou si c’est elle qui nous maîtrisera. Durant cette période, la moindre impulsion d’un groupe d’hommes, qui savent quoi faire et comment le faire, pourra être la différence entre un nouveau recul dans l’âge de ténèbres, ou l’avènement en pleine lumière d’une ère d’une telle splendeur, que nous pouvons à peine imaginer. C’est cette nécessité de la connaissance du moment psychologique, et du choix de l’action appropriée, qui devrait être présente à l’esprit de cette minorité consciente de la gravité des temps présents. »

Clifford Hugh Douglas, 1924