Selon l’ingénieur Laurent Castaignède, le monde de la voiture électrique fonce droit vers un « electric gate » ou un « electric crash ». Le système actuel n’est pas tenable. « La voiture électrique a manifestement mis la charrue avant les bœufs. » Laurent Castaignède, ingénieur de formation et auteur spécialisé dans la cause écologique, tire la sonnette d’alarme. D’ici à 2030, l’agence internationale de l’énergie s’attend à voir le nombre de voitures électriques en circulation multiplié par 8, un désastre pour Laurent Castaignède. Dans son dernier livre La ruée vers la voiture électrique, Entre miracle et désastre (éd. Écosociété, 2023), il annonce l’arrivée d’un crash semblable au dieselgate. En effet, plusieurs obstacles se dressent sur la route de la voiture électrique et de la transition écologique en général.

Les chiffres de l’IEA

Selon l’Agence internationale de l’énergie (IEA), le scénario « du développement durable » d’ici 2040 va nous contraindre à produire 904 000 tonnes de lithium par an, contre 22 000 tonnes en 2020. La production annuelle de lithium va devoir être 41 fois celle de 2020. Il en va de même pour le cobalt dont la production devra être multipliée par 21. Telles sont les contraintes qu’imposent le programme « des voitures électriques ». Il est impossible au secteur minier, déjà en surchauffe, de démultiplier sa production par 20 ou 40. S’il y parvenait malgré tout, il engendrerait des pollutions sur des centaines de millions de km². Rappelons ici que toute mine pollue pour des milliers d’années les sols, les eaux de surface, les nappes phréatiques et l’air. L’ingénieure Aurore Stéphant explique que certaines mines, datant de l’époque romaine, continuent de poser aujourd’hui de graves problèmes environnementaux.

Quadrupler la production de cuivre ?

Une voiture thermique nécessite en moyenne 20 kg de cuivre, une voiture électrique nécessite en moyenne 80 kg de cuivre en prenant en compte les bornes et l’installation du réseau.

Pour les bornes électriques des particuliers et des entreprises, l’IEA considère qu’il faudra mettre en service entre 200 000 et 350 000 bornes par an d’ici 2030.

Toujours dans le cadre « du développement durable », les chiffres de l’IEA montrent qu’il faudra doubler le réseau électrique existant en passant de 75 millions de km à 160 millions de km d’ici 2040. Toutes ces installations ne sont pas sans conséquences environnementales.

Multiplier par 8 le nombre de voitures électriques

Le Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA) déclare avoir construit 2,2 millions de véhicules électriques. La transition « écologique » exige que cette production soit multipliée par 8. Cela amènerait le parc de voitures électriques à environ 18 millions. Les batteries ont une espérance de vie de 4 à 5 ans, ensuite elles sont si détériorées qu’elles ne peuvent plus être recyclées pour une voiture. Il faudra donc produire 18 millions de batteries neuves tous les 5 ans. C’est inconcevable et impossible du fait des tensions sur le marché du lithium et du cobalt.

Pollutions du recyclage

En fin de vie, l’électrolyte liquide d’une batterie électrique produit de l’acide chlorhydrique, les matériaux internes sont corrodés. Officiellement, elle est recyclable à 70 %. Mais que fait-on des millions de litres de son électrolyte liquide ? Pour 18 millions de batteries cela représente environ 1 milliard de litres, soit 1 million de tonnes. Une fois vidée (on ne sait toujours pas ce qu’il advient du liquide interne), ces batteries sont concassées et chauffées dans un four à pyrolyse pour en récupérer les métaux. Le niveau de récupération avec ce processus est inconnu, concernant le manganèse, le cobalt, le nickel et le lithium. Par ailleurs, passer 18 millions de batteries au four à pyrolyse a un coût énergétique non évalué, il s’agit de traiter environ 5 millions de tonnes de déchets. Ce type de recyclage est un chantier très obscur, son impact écologique n’est pas mesuré. Et pourtant, il devra devenir un vecteur industriel en croissance exponentielle, puisqu’il faudra recycler tous les cinq ans des centaines de millions de tonnes batteries électriques à l’échelle mondiale.

Impact écologique des mines

L’ingénieure Stephant Au -rore de SystExt explique : « Dans les mines d’Afrique du Sud le niveau de concentration de l’or est de 2 grammes pour une tonne de minerai. Cette tonne de minerai est broyée pour être concentrée. L’étape suivante consiste à extraire chimiquement l’or avec du cyanure. Enfin, la dernière étape consiste à raffiner le tout pour obtenir de l’or à 99,99 %. Ce processus nécessite énormément d’eau. Une mine d’or moyenne consomme la quantité d’eau de 80 000 habitants par an. Elle consomme, en moyenne, l’électricité de 31 000 foyers français ».

« L’industrie minérale est le premier producteur de déchets toxiques solides, liquides et gazeux, tous secteurs industriels confondus. Les dégâts environnementaux miniers sont irréversibles sur des milliers d’années. Il est impossible de dépolluer un site minier ».

Aujourd’hui les minerais sont de plus en plus pauvres et extrêmement difficiles à raffiner. Ils exigent plus d’eau, plus de consommation électrique et toujours plus de pollution. Cette réalité contraste avec une demande qui devient exponentielle pour répondre à la politique de transition « écologique ». « La quantité de métaux à produire pour les 35 prochaines années dépasserait la quantité cumulée produite depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours ». C’est quantitativement impossible. Du point de vue des dégâts environnementaux irréversibles c’est un écocide global programmé à seule fin de fabriquer massivement des voitures électriques.

Exploitation de tous les métaux

La table de Mendeleïev dispose de 85 éléments chimiques dits naturels. Dans une voiture électrique, il y a 75 substances chimiques naturelles. Continuer à en produire provoquera une exploitation terminale de presque tous les métaux existants sur Terre. La première surexploitation s’est faite avec la révolution numérique et téléphonique. Un téléphone portable contient 50 à 60 métaux différents. C’est un bijou technologique commun mais qui a nécessité une explosion de l’exploitation minière. Par ailleurs, il est impossible de recycler tous les métaux d’un smartphone, ou d’une voiture électrique. C’est une perte nette métallique qui n’est pas sans conséquences.

Une politique écologique écodidaire

Dans le domaine énergétique, les scénarios reposent sur des intentions collectives affichées ou présumées qui n’engagent que ceux qui y croient. La ruée frénétique vers le tout-électrique décarboné va se fracasser sur le mur des réalités physiques de l’exploitation minière dont l’impact environnemental et financier n’est pas tenable. On se demande comment des politiciens ont pu imaginer « une révolution verte » sans se soucier de sa faisabilité et de l’impact écocidaire qu’elle représente pour la planète.

Nota : Des batteries à nanotubes de carbone, associées à une motorisation magnéto-cinétique type Minato, permettraient d’avoir des véhicules électriques ayant plus de 10 000 km d’autonomie.

Sources :
Association des climato-réalistes,
Stephant Aurore, SystExt.org
Morphéus n° 122, mars/avril 2024